La lutte contre la grande délinquance financière
Le Parquet national financier (PNF) a été créé pour répondre à des objectifs de transparence démocratique et de moralisation de la vie publique. Sa création trouve son origine dans les suites de l’affaire « Cahuzac » qui avait largement défrayé la chronique en 2012. L’ancien ministre avait notamment été mis en cause pour des délais de fraude fiscale et de blanchiment de fraude fiscale.
Le PNF traite les affaires de délinquance économique et financières les plus complexes qui « portent atteinte à la solidarité nationale, à l’exemplarité et à la confiance dans les institutions, lorsqu’elles sont commises en France, et sous certaines conditions, à l’étranger ». Son champ de compétences concerne les atteintes :
- aux finances publiques (fraude fiscale complexe, escroquerie à la TVA de grande complexité…) qui représentent 44 % des dossiers traités ;
- à la probité (corruption, trafic d’influence, favoritisme…) avec 47 % des dossiers traités ;
- au bon fonctionnement des marchés (délit d’initié, diffusion d’informations fausses ou trompeuses…) avec 6 % des dossiers ;
- relatives au libre jeu de la concurrence (entente illicite, abus de position dominante).
Des magistrats spécialisés avec un fonctionnement collégial
Le procureur de la république financier est à la tête du PNF. Il dépend hiérarchiquement du Procureur général de Paris. Aujourd’hui, vingt magistrats spécialisés en matière économique et financière œuvrent au sein de l’institution. Ils sont assistés dans leurs missions par une équipe de professionnels du droit qui leur apportent les expertises nécessaires à la conduite des enquêtes. Parmi eux, neuf assistants spécialisés – en fiscalité, droit boursier, comptabilité, marchés publics, droit de la fonction publique, saisies-confiscations ou encore informatique.
La spécificité des affaires traitées a conduit le PNF à mettre en place une organisation de travail dédiée. Ainsi, c’est un binôme qui est affecté à chaque affaire. Le croisement des analyses menées par chacun des magistrats permet de renforcer et valider chaque étape de ces procédures souvent très complexes et sensibles.
La méthode de travail du Parquet est originale. Les procédures sont en grande majorité ouvertes en enquête préliminaire. Les informations judiciaires quant à elles sont dédiées aux affaires nécessitant des mesures de sûreté ou revêtant un caractère de complexité ou de sensibilité particulier.
Le Parquet recourt systématiquement aux enquêtes au contradictoire, ce qui permet aux parties d’accéder à la procédure et de formuler les observations avant l’engagement d’éventuelles poursuites.
Le PNF s’est aussi approprié l’utilisation de nouveaux outils innovants.
Ainsi, la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP), créée en 2016, offre une diversification de la réponse pénale pouvant être apportée aux faits commis par les personnes morales, notamment les entreprises. La CJIP combine la dimension répressive des sanctions et la dimension préventive avec la mise en œuvre d’un programme de conformité anticorruption au sein de l’entreprise. En outre, la CJIP offre la possibilité à l’entreprise suspectée de se placer directement dans une position de coopération avec l’autorité judiciaire, en contribuant aux investigations par le biais d’une enquête interne, voire en lui révélant les faits.
La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) est utilisée dans les cas de poursuite en matière fiscale et autorise le prononcé de peines supérieures à un an.
Les affaires du PNF sont jugées par la 32ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris.
Retour sur les dix ans d’activité du PNF
En dix ans, plus de 3 200 procédures ont été initiées par le Parquet national financier et ont donné lieu à 532 condamnations.
Source : bilan d’activité 2023 du PNF
L’activité du Parquet national financier est en hausse constante depuis sa création.
En novembre 2024, 771 affaires sont en cours.
Parmi les procédures traitées actuellement, 40 % proviennent de signalements par des autorités publiques.
SOMMES PRONONCÉES EN FAVEUR DU TRÉSOR PUBLIC EN 2023
Source : bilan d’activité 2023 du PNF
**Les « sommes issues des contrôles fiscaux » correspondent aux sommes recouvrées par l’administration fiscale dans les procédures administratives connexes aux procédures pénales traitées par le PNF, en cas de condamnation ou de convention judiciaire d’intérêt public
Depuis la création du PNF, un total de 12,217 milliards d’euros d’amendes, de confiscations, de dommages-intérêts et de redressements fiscaux a été prononcé au profit du Trésor public.
Source : bilan d’activité 2023 du PNF
*Les données des affaires dites terminées correspondent aux sanctions prononcées en première instance par le tribunal correctionnel de Paris et ne prennent pas en compte les conséquences sur ces peines des éventuelles décisions d’appel ou de cassation prononcées ultérieurement.
Au niveau européen, il existe depuis le 1er juin 2021 un parquet européen, chargé de lutter contre la fraude transnationale. Ce Parquet est commun aux vingt-deux états de l’Union européenne adhérents et siège au Luxembourg.
Le Parquet européen est un organe indépendant de l’Union européenne chargé de « rechercher, poursuivre et renvoyer en jugement les auteurs d’infractions pénales portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union » telles que :
- la fraude ;
- la corruption ;
- le blanchiment de capitaux ;
- la fraude transfrontière à la TVA.
Pour aller plus loin :
« 10 ans du parquet national financier - synthèse 2023. »
Axel Masson
Rédaction des Experts du Patrimoine (Village des Notaires)