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Divergence formelle sur un testament privé : une proposition de conciliation entre le droit français et le droit brésilien

Divergence formelle sur un testament privé : une proposition de conciliation entre le droit français et le droit brésilien

Le testament privé français pourra être confirmé par un juge brésilien, même si en passant par une relecture du Code Civil de 2002 par la jurisprudence du Tribunal Supérieur de Justice Brésilien, ce testament contient un vice simplement formel, passible de registre des biens immobiliers brésilien.

1) Y a-t-il une différence formelle entre le testament privé français et le brésilien relatif aux biens immobiliers situés au Brésil ?

Le § 1º de l’art. 1.876 du Code civil brésilien exige une participation de, au minimum, 03 (trois) témoins, comme condition essentielle de la validation du testament privé, en plus de la permission d’être écrit à la main ou par processus mécanique. De cette façon, il y a la possibilité qu’un tiers l’écrive et que le testateur ait juste à le signer.

D’autre part, l’article 970 du Code civil français n’exige pas la présence de témoins, mais exige qu’il soit, si écrit, daté et signé de la main du testateur, qui n’est assujetti à aucune autre formalité. D’ailleurs, le testament dicté par un tiers sera nul, même si le testateur le signe.

  • § 1º [de l’article 1.878 du Code Civil brésilien] : « S’il est écrit de la main du testateur, sont considérées comme exigences essentielles à sa validation que le testament soit lu et signé pour celui qui l’a écrit, dans la présence d’au moins trois témoins, qui doivent le notifier ».
  • art.970 [du code civil français] : « Le testament olographe ne sera point valable s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n’est assujetti à aucune autre forme ».

Cependant, quand il y a des circonstances exceptionnelles déclarées dans le document, l’art. 1.879 du Code Civil brésilien dispense des témoins, « pouvant » être confirmé par le juge. Ainsi, il s’agira d’un jugement par équité, très subjectif de la part du juge pour vérifier la volonté du testateur, et non par la légalité, dont les aspects formels du testament servent de sécurité et de confirmation de la volonté du testateur. Donc, on constate que les normes civiles sur le testament privé français et brésilien sont complètement différentes.

2) Comment résoudre le conflit de normes sur le testament privé français et le brésilien relatif aux biens immobiliers situés au Brésil ?

Par suite de la divergence formelle entre les testaments brésiliens et français, l’idée la plus évidente serait d’éloigner la règle « locus regit actum » (le lieu régit l’acte), pour la remplacer par la loi du domicile du « de cujus », pour assurer la déclaration de volonté du testateur après la mort.
Le problème est que, selon le droit procédural brésilien, pour reconnaître les actions relatives aux biens immobiliers situé au Brésil, ainsi que pour confirmer un testament privé, même si le testateur est étranger, la compétence judiciaire sera brésilienne, avec l’exclusion de toute autre juridiction étrangère (article 23, I et II, da Lei Federal n.º 13.105/2015 – Code de Procédure Civile de 2015).

La Convention du 5 octobre de 1961 sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires, renforce l’argument de la norme procédurale brésilienne, comme mentionné ci-dessus. Selon l’article 1º de la Convention, le testament est considéré comme valable quant à la forme si celle-ci répond à la loi interne : a) du lieu où le testateur a disposé, ou b) d’une nationalité possédée par le testateur, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès, ou c) d’un lieu dans lequel le testateur avait son domicile, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès, ou d) du lieu dans lequel le testateur avait sa résidence habituelle, soit au moment où il a disposé, soit au moment de son décès, ou e) pour les immeubles, du lieu de leur situation.

Malgré la possibilité d’utiliser la Convention citée pour résoudre le conflit normatif mentionné entre les lois françaises et brésiliennes, il y a un autre problème également important : la présence des témoins au testament sous seing privé correspond à sa validation formelle, cela veut dire que ça correspond à l’ordre public du système brésilien.

Donc, dans le cas où il serait possible d’appliquer la loi française sur la base de l’article 1º de la Convention, dont le système français permet le testament sous seing privé sans la présence de témoins, cela impliquerait une incompatibilité avec l’ordre public brésilien, car le droit civil brésilien n’admet pas, en règle générale, un testament privé sans témoins. Dans ce contexte, tout indique que l’application de la Convention n’est pas admise lorsqu’il y a une expresse violation de l’ordre public, conformément à l’art. 7º de la Convention du 5 octobre 1961, sur le conflit de lois quant à la forme des dispositions testamentaires.

En outre, il sera également possible de rappeler le Règlement (UE) n.º 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012, car son article 75 détermine que, « en particulier, les États membres qui sont parties à la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 sur les conflits de lois en matière de forme des dispositions testamentaires continuent à appliquer les dispositions de cette Convention au lieu de l’article 27 du présent règlement pour ce qui est de la validité quant à la forme des testaments et des testaments conjonctifs ».

Ce qu’il se passe est que la convention mentionnée ne s’applique pas sur le territoire brésilien car la norme de testament privé concernant les témoins est manifestement incompatible avec la norme sur testament privé brésilien selon l’article 7 (« L’application d’une des lois déclarées compétentes par la présente Convention ne peut être écartée que si elle est manifestement incompatible avec l’ordre public »).

Sinon si on suit cette logique, le règlement (EU) n.° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012 car son article 35 détermine que « l’application d’une disposition de la loi d’un Etat désignée par le présent règlement ne peut être écartée que si cette application est manifestement incompatible avec l’ordre public du for ».

Néanmoins, nous allons vérifier s’il y a une atténuation de cet ordre public du testament privé brésilien par le Tribunal Supérieur de Justice brésilien, une fois qu’il ne semble pas plausible l’utilisation de la Convention du 5 octobre 1961 sur les conflits de lois en matière de forma de dispositions testamentaires, ni même le règlement (EU) n.°650/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 4 juillet 2012.

3) Quel est l’avis du Tribunal Supérieur de Justice (STJ) brésilien sur un testament privé concernant les biens immobiliers situés au Brésil ?

Le Tribunal Supérieur de Justice (STJ) brésilien a une interprétation consolidée à propos de la préservation de la volonté du testateur. En 2010, la 4ème chambre du STJ a confirmé la validation du testament particulier, rédigé et signé par quatre témoins, dont trois l’ont confirmé à l’audience d’instruction et jugement (REsp n. 701.917/SP, rapporteur Ministre Luís Felipe Salomão, 4ème chambre, DJe du 1/3/2010).

En 2017, le STJ n’a pas flexibilisé la confirmation de testament particulier en cas d’absence de signature du testateur, étant impossibilité de signer par manque de coordination des mouvements ce qui implique, par conséquent, des sérieux doutes concernant la santé et la propre manifestation de la volonté du testateur (REsp n. 1.618 .754/MG, rapporteur de la décision, le Ministre Ricardo Villas Bôas Cueva, Troisième Chambre, DJe du 13/10/2017). Dans ce cas, il se configure un vice formel-matériel parce qu’il n’a pas été signé pour celui qui a écrit le testament, dans les termes du § 1º de l’art. 1.876 du Code Civil de 2002, de plus il y a eu de doutes sur la vraie volonté de disposer d’un testament privé.

En 2018, la 3ème Chambre du STJ, a admis une atténuation des formalités de testament particulier, par le biais de vices appelés purement formels, de moindre gravité, en atteignant seulement l’efficacité du testament. Dans ce cas, seulement deux témoins ont participé au testament particulier, en divergeant de l’art. 1.876, § 1º, du Code Civil de 2002, qui exige « (...) la présence d’au moins trois témoins ». Tout de même, la 3ème Chambre du STJ entend comme un acte purement formel, touchant seulement l’efficacité du testament particulier, une fois vérifiée l’inexistence doute ou des questions relatives à la capacité civile du testateur ou sur sa réelle intention de disposer de ses biens en forme constante dans le testament olographe, dénommé de vice formel-matériel (REsp 1.583.314/MG, 3ª Chambre, DJe 23/08/2018).

En 2022, la 3ème Chambre du STJ accepterais, a contrario sensu, la validité du testament particulier, s’il avait la déclaration des circonstances exceptionnelles de l’absence de témoin dans le document, dans les termes de l’art. 1.879 du Code Civil, ainsi que l’enquête adéquate de la véracité de la signature du testateur (REsp n. 2.005.877/MG, rapporteuse la Ministre Nancy Andrighi, 3ème tour, DJe du 1/9/2022).

Enfin, la 2ème section du STJ a atténué l’exigence de signature prévue au § 1º et au § 2º de l’art. 1.876 du Code Civil de 2002, lorsqu’elle a admis la validité d’un testament particulier seulement avec l’empreinte digitale de la défunte, car il n’aurait pas de doute concernant sa dernière manifestation de volonté, ainsi qu’aucune restriction cognitive de la testatrice, c’est-à-dire elle savait ce qu’elle faisait (REsp n. 1.633.254/MG, rapport de la Ministre Nancy Andrighi, Deuxième Section, jugé le 11/3/2020, DJe du 18/3/2020).

Il se vérifie donc que le STJ a pour but le maintien de la volonté du testateur, néanmoins la présence des vices purement formels dans un testament holographique et non pas nécessairement la présence de témoins, lesquels ont une nature instrumentale.

4) Si on prend la jurisprudence du STJ brésilien au sujet de la mitigation de testament privé pour accepter l’application du testament français qui dispose sur l’immeuble situé au Brésil, alors est-ce qu’on pourrait affirmer que la loi française sera appliquée sur le territoire brésilien ?

La compétence juridictionnelle reflète la souveraineté d’un pays, une fois qu’elle doit être exercée à l’intérieur de son territoire national, sans violation par n’importe quel autre État souverain. Cela est si vrai que l’élaboration de traités et de conventions internationales concernant diverses étapes, jusqu’à leur acceptation interne par plusieurs États souverains.

Cependant, il y a certaines exceptions en matière de souveraineté, par exemple les normes tributaires, celles d’arbitrage et de droits humains.

Nonobstant, même avec des exceptions, il faut prendre en considération les principes généraux adoptés par le Brésil comme : les bons costumes et l’ordre public. A titre d’illustration nous avons la Loi fédérale n. 9.307/1996, qui dispose en matière d’arbitrage, dont l’art. 2º, § 1º, permet que les parties choisissent librement les règles de droit qui seront appliquées à l’arbitrage, de sorte que les bons costumes et l’ordre public ne soient pas violés.

Eh bien, le I de l’art. 23 du Code de procédure civile de 2015 détermine que l’autorité judiciaire brésilienne est compétente, avec l’exclusion de toute autre en ce qui concerne les actions relatives aux immeubles situés au Brésil. Donc, il s’agit d’une question d’ordre public car ce sera une confirmation de testament particulier (point II de l’art. 23 du Code de Procédure Civil de 2015), même qu’il soit rédigé dans un pays étranger, concernant les immeubles situés au Brésil.

Dans ce contexte, il est possible de conclure, au moins théoriquement, que, si la Convention sur le testament privé et le Règlement (UE) n.º 650/2012 du Parlement européen et du Conseil n’arrivent pas à atténuer les normes internes du Brésil, il sera sans efficace le testament olographe français sur le territoire national brésilien, en ce qui concerne les immeubles situés au Brésil, pour ne pas respecter la norme d’ordre public brésilienne, même si le Tribunal supérieur de Justice adopte une interprétation moins rigoureuse de la confirmation du testament privé brésilien (art.1.876 à 1.880).

Peut-être pour faire face à la rigidité du Code Civil de 2002, il faudra analyser les normes de la Loi d’introduction aux normes du Droit Brésilien, réglementées par le Décret-Loi n. 4.657, du 4 septembre 1942, modifié par la Loi Fédérale n. 12.376/2010), pour vérifier s’il existe encore des empêchements à la confirmation des testaments privés français, disposant sur des biens immeubles situés au Brésil.

5) Dans ce contexte, existe-t-il une norme interne brésilienne qui permet l’application de la loi étrangère dans la confirmation de testaments privés étrangers des biens immeubles situés au Brésil, sans violer sa norme d’ordre public et ses bons costumes ?

On peut remarquer la subtilité de la question : l’art. 23, I et II, du Code de Procédure Civil brésilien de 2015, défini la compétence de la juridiction brésilienne, à l’exclusion de toute autre compétence de pays étrangers. Ainsi, ipso facto, l’application de la loi étrangère est aussi exclue, à l’exception de prévision législative contraire, à l’exemple de la loi d’arbitrage (Lei n. º 9.307/1996) et du Règlement (UE) n. º 650/2012 du Parlement européen et du Conseil.

Au Brésil, le § 1º du art. 2º de la Loi d’Arbitrage permet aux parties le libre choix d’application des règles de droit. En France, l’art. 22 du Règlement (UE) n.º 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, permet également le choix de la loi de succession de nationalité du cujus ou, au contraire, au moment de son décès.

De cette façon, le Code de procédure civile brésilien, démontre sa souveraineté en appliquant sa législation sur le territoire national, sauf en cas d’atténuation prévue par la loi. Dans ce cas, il s’agit d’une territorialité atténuée, à l’exemple du décret-loi n.º 4.657/42, qui traite sur la loi d’introduction au code civil brésilien, modifiée par la loi fédérale n. 12.376/2010.

L’art 10 du décret-Loi mentionné prévoit qu’en cas de mort ou de disparition, la succession obéit à la loi du pays dans lequel est domicilié le défunt ou le disparu, peu importe la nature ou situation de ses biens, ainsi que « la succession des biens d’étrangers, situés dans le pays, sera réglementée par la loi brésilienne au bénéfice du conjoint ou des enfants brésiliens, ou de celui qui les représente, dès que la loi personnelle du de cujus ne leur soit pas plus favorable ».

D’ailleurs, l’art. 10 du Décret-Loi mentionné ci-dessus est devenu une garantie fondamentale de l’individu, dans les thermes du XXXI de l’art. 5º, de la Constitution Fédérale de 1988, à savoir : « la succession des biens des étrangers situés dans le pays sera réglementée par la loi brésilienne au bénéfice du conjoint ou des enfants brésiliens, sauf si la loi de succession étrangère leur soit plus favorable ».

En résumé, le décret-loi détermine que, en cas de succession mortis causa d’étrangers possédant des biens immeubles, il s’appliquera, en règle générale, la législation brésilienne au bénéfice du conjoint ou des enfants brésiliens, sauf si la loi de succession étrangère est plus favorable à eux.

Notez que, même si la norme brésilienne ne spécifie pas le type de succession, est de sa tradition la succession ab intestat ou testamentaire car il y avait le règlement depuis la Loi d’introduction au Code civil de 1916 (révoquée par le Code civil de 2002) jusqu’au décret-loi n° 4.657/42 (Loi d’introduction aux normes de droit brésilienne) permettant l’application, sur le territoire brésilien, de la législation en matière de succession du défunt étranger par rapport à ses biens immobiliers situés au Brésil.

De plus, les normes susmentionnées (Decret-Loi n.º 4.657/42 et Constitution fédérale de 1988), traitent de la loi de succession mortis causa et non du testament privé, dont les normes sont dans le code civil brésilien et français. Cependant, si l’hypothèse normative est de bénéficier le conjoint et les enfants brésiliens, sans préjudicie de la volonté du défunt, il est possible l’application de la loi étrangère au territoire brésilien pour la confirmation de testament holographique étranger concernant les biens immeubles situés au Brésil.

Dans ce cas, l’art. 970 du Code civil français attribue plus de force juridique au testateur privé brésilien, pour les motifs suivants : i) le testament holographique français ne nécessite pas de témoins pour confirmer sa validité, au contraire du testament privé brésilien, dans les thermes de l’art. 1.878 du Code Civil brésilien de 2002 ; et ii) la validité du testament privée français dépend de la manière de l’écrire, c’est à dire, il doit être écrit en entier de sa propre main.

D’autre part, la jurisprudence du Tribunal Supérieur de Justice du Brésil a configuré le testament privé français d’une manière purement formelle sur le territoire brésilien, par l’absence de témoins pouvant être validée par un juge brésilien.

6) Considérant la possibilité de confirmer le testament privé français sur le territoire brésilien, il sera également possible d’éloigner quelconque exigence de la Loi des registres publics brésilienne (Lei n. 6.015/73) ?

Il est important de préciser que malgré la possibilité de confirmation d’un testament privé français par un juge brésilien, seront maintenues les exigences de la Loi des Registres Publics (Loi Fédérale n. 6.015/73). Par exemple, le document testamentaire susmentionné doit contenir les exigences de l’art. 176, II et III, de la Loi Fédérale n.º 6.015/73 (Loi de Registres Publics brésilienne), concernant le folio réel (matricule) et au registre immobilière, c’est à dire, il devra contenir le nom, la nationalité, l’état civil et l’adresse sur de testament.

En outre, même en Europe, les exigences du droit immobilier ne sont pas écartées, raison par laquelle il serait important de mentionner le considérant 18 du Règlement (UE) n.º 650/2012 du Parlement européen et du Conseil, en précisant que « les exigences relatives à l’inscription dans un registre d’un droit immobilier ou mobilier devraient être exclues du champ d’application du présent règlement ».

CONCLUSION

Ainsi, le testament privé français pourra être confirmé par un juge brésilien, même si en passant par une relecture du Code Civil de 2002 par la jurisprudence du Tribunal Supérieur de Justice Brésilien, ce testament contient un vice simplement formel, passible de registre des biens immobiliers brésilien.

  • Divergence formelle sur un testament privé : une proposition de conciliation entre le droit français et le droit brésilien

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