Contexte porteur pour la transformation de locaux d’activité en logements
Une étude de décembre 2022 de CBRE, leader mondial du conseil en immobilier d’entreprise, montre que le terrain semble actuellement favorable à la réalisation de ce type d’opérations. [1]
CBRE démarre son analyse en indiquant que la réversibilité immobilière, c’est-à-dire le changement d’usage des locaux en logements demeure encore actuellement un marché de niche. Cependant, elle est largement revenue sous les feux de l’actualité depuis la pandémie de COVID-19. En effet, avec les confinements et le développement massif du télétravail, de larges pans de l’immobilier de bureaux sont restés longtemps inoccupés. Dans un contexte de pénurie de logements, notamment en Île-de-France, de nombreuses voix se sont élevées pour discuter de l’avenir de ce parc immobilier de bureaux.
CBRE indique que plus de 800 opérations de conversions de locaux tertiaires sont initiées chaque année en France. Plus de 1,2 million de m 2 de surfaces sont concernées avec à la clé un flux de plus de 2 000 logements créés chaque année. L’Île-de-France en représente plus de 20% du total, suivi par Auvergne-Rhône-Alpes (13%), les Hauts-de-France (9%) et Provence-Alpes-Côte d’Azur (9%).
L’étude rappelle que le marché du logement résidentiel est tendu dans certaines zones du territoire et particulièrement en Île-de-France. La pénurie d’offre de biens et le niveau général des prix de l’immobilier s’alimentent et créent une situation compliquée pour les personnes ayant besoin de se loger. La situation du logement est très complexe, puisqu’en parallèle, il existe une vacance locative importante avec de nombreux logements inoccupés, notamment à Paris.
La transformation de bureaux en logements contribue également à répondre aux enjeux de sobriété énergétique et foncière. Elle favorise aussi la réduction de l’empreinte carbone de l’immobilier, à travers le recyclage urbain. Ainsi, les investisseurs institutionnels semblent se saisir de plus en plus de cette opportunité pour réfléchir à l’avenir de leurs parcs immobiliers, pour des raisons tant réglementaires qu’économiques.
Le parc tertiaire est en recomposition avec une accélération de l’obsolescence géographique. La pandémie de la COVID-19 a accéléré des tendances déjà observées sur le marché du travail, comme le développement des modes de travail hybrides. Le télétravail est devenu un outil incontournable de fidélisation et d’attractivité des talents, mais aussi pour l’entreprise, un outil d’optimisation de son empreinte immobilière. Réduire les surfaces dédiées aux bureaux permet de faire des économies de coûts substantielles. Les localisations centrales proches des transports sont de nouveau recherchées et les zones périphériques laissées de côté.
Plus de 4,5 millions de m 2 de bureaux sont actuellement inoccupés en Île-de-France [2]. Le phénomène de vacance de longue durée (vacance d’une durée supérieure à quatre ans) s’est également accru sur certains territoires. CBRE a estimé au 3ème trimestre 2022 que plus de 741 000 m 2 sont frappés d’une vacance de longue durée. Cette vacance est très inégalement répartie : presque inexistante dans Paris Centre Ouest et Paris Nord, elle est surtout concentrée en 2 ème couronne et dans le Croissant Ouest (Rueil-Malmaison - Colombes -Bois-Colombes / Asnières - Gennevilliers / Meudon - Sèvres).
Au-delà de la vacance, il semble que l’obsolescence technique d’un immeuble de bureaux ait aussi tendance à s’accélérer. Auparavant, la durée de vie d’un immeuble de bureaux était relativement longue et stable, autour de 30 à 40 ans en moyenne. Avec l’évolution des modes de travail et la réglementation environnementale, décret tertiaire [3] et décret BACS [4] notamment, l’obsolescence technique raccourcit le cycle de vie du bureau. La mise aux normes est parfois trop coûteuse pour être rentable économiquement, ce qui pousse les propriétaires des immeubles à réfléchir à des changements d’usage.
La réversibilité reste toutefois une opération complexe et il subsiste encore des freins à une généralisation rapide et massive de ce type d’opérations. Certains acteurs se positionnent sur ce créneau de la transformation immobilière, dont la Foncière de Transformation Immobilière (FTI).
La Foncière de Transformation Immobilière
La Foncière de Transformation Immobilière est une filiale du groupe Action Logement. Elle a été créée en 2020 et son modèle de foncière est au service de l’offre de logements abordables dans les territoires.
Action Logement
Depuis sa création en 1953, Action Logement a pour mission de faciliter l’accès au logement des salariés et ainsi favoriser l’emploi. Action Logement gère notamment la Participation des Employeurs à l’Effort de Construction. [5]
Grâce à cet effort financier demandé aux entreprises, Action Logement développe une offre de logements en faveur des salariés, contribue à la performance des entreprises et à l’attractivité des territoires, notamment le cœur des villes moyennes. Action Logement a ainsi deux missions principales :
- construire et financer des logements sociaux et intermédiaires, prioritairement dans les zones tendues, en contribuant aux enjeux d’éco-habitat, d’économies d’énergie et de décarbonation, de renouvellement urbain et de mixité sociale ;
- accompagner les salariés dans leur mobilité résidentielle et professionnelle.
Genèse de la FTI : le plan d’investissement volontaire d’Action Logement d’avril 2019
L’offre de logements abordables en zones tendues est un enjeu majeur. Les salariés, singulièrement les plus jeunes, rencontrent des difficultés pour accéder à des logements proches de leurs lieux de travail. Action Logement a identifié la transformation de bureaux et locaux d’activités en logements comme une piste pour répondre à cet objectif.
En avril 2019, lors de la présentation de son plan d’investissement volontaire à la presse, [6] le groupe a annoncé ainsi la création de la Foncière de Transformation Immobilière (FTI).
Les objectifs de la FTI
À sa création en 2020, la FTI s’est vu confiée la réalisation dans un délai de trois à quatre ans des objectifs suivants :
- investir 1,5 milliard d’euros pour acquérir des immeubles à transformer en logements ;
- favoriser la production de vingt mille logements dont une part prépondérante abordable pour les familles des salariés, les travailleurs clés, les étudiants et les jeunes actifs ;
- réduire de 50% l’impact carbone des logements produits et contribuer à la limitation de l’artificialisation des terres.
Les métiers de la FTI
Grâce à ses fonds propres et aux concours bancaires, la foncière achète de l’immobilier commercial (bureaux, locaux d’activités, hôtels, commerces, etc.) pour en proposer une partie prépondérante en baux long terme à l’ensemble des opérateurs de logement social ou intermédiaire. Ainsi, la durée des baux logements locatifs sociaux (LLS) peut dépasser 40 ans et celle des baux locatifs intermédiaires (LLI) atteindre 25 à 35 ans.
La mise en œuvre du démembrement de propriété foncier (séparation juridique du droit de propriété immobilière entre nue-propriété et usufruit), via les baux à construction (BAC), permet de créer les conditions de l’équilibre financier des opérations de transformation immobilière. Dans une volonté de mixité sociale et d’usage, la foncière revend aussi des droits à construire aux opérateurs privés pour la production de logement dans le secteur libre.
La FTI vise à développer puis à proposer une ingénierie foncière, de projet et financière au service de l’ensemble des opérateurs du logement. Ces derniers seront ensuite chargés de la maîtrise d’ouvrage des opérations de transformation et la gestion des logements pour le compte des bailleurs privés et publics.
LA FTI accompagne également les territoires en mobilisant ses expertises et son modèle économique original au service d’une production urbaine qualitative et exemplaire en terme environnemental.
L’année 2024 sera l’occasion de faire un bilan des quatre premières années d’existence de la FTI.
Notes :
[3] « Décret tertiaire » : Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.
Axel Masson
Rédaction des Experts du Patrimoine (Village des Notaires)