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Les réseaux de notaires ont le vent en poupe

Les réseaux de notaires ont le vent en poupe

Face aux défis que la profession doit relever, les réseaux constituent une réponse très pertinente. Les notaires ne s’y sont pas trompés, et tous les réseaux que nous avons interrogés pour cet article voient leur activité se développer et le nombre de leurs membres augmenter. Nous avons donc voulu mieux comprendre les dynamiques de ces réseaux notariaux, à la fois dans leur fonctionnement, leurs objectifs et leurs perspectives. Comment procèdent-ils pour créer un label connu et reconnu qui identifie les notaires comme des interlocuteurs de qualité ? Et comment fonctionne leur action en interne pour développer l’expertise et les compétences de chacun des membres ?

Un aspect majeur de la plupart des réseaux de notaires est de constituer un label et une marque destinés aux clients potentiels. Cette stratégie vise avant toute chose la visibilité de l’action notariale dans cette spécialité : « L’objectif, souligne Vincent Chauveau, animateur de Notaires conseils de famille (NCF), est de rendre l’activité notariale en droit de la famille accessible au plus grand nombre ; nous avons par exemple publié un article sur le PACS qui a été lu plus de 10 000 fois, et nous montons également une application pour du petit diagnostic rapide en ligne ».
Parmi les outils que les réseaux permettent de mettre en place, le partenariat est un élément crucial. Il peut porter sur les relations avec les représentants de la clientèle – « les syndicats professionnels de l’hôtellerie et de la restauration, indique François Chalvignac, président du réseau Notel, nous demandent notamment de réaliser une veille juridique et des formations pour leurs membres » –, mais aussi sur la recherche de sources de mécénat, ou bien l’organisation de formations, à l’image du partenariat entre l’Inafon et Notaires conseils en immobilier (NCI).
Le fonctionnement en réseau permet d’être dans une logique de prospection, notamment en ligne, « démarche, précise Vincent Chauveau, qui n’est pour l’instant accessible qu’à une cinquantaine d’études en France, en raison des moyens qu’elle demande, car un notaire seul n’a pas les moyens de s’offrir les services, comme nous le faisons à NCF, d’un conseiller en communication digitale et d’un community manager ».
A travers cela, l’objectif des réseaux consiste à développer un « réflexe notaire » dans des domaines où différents publics ont pris l’habitude de faire appel à d’autres professionnels. « À Notaires conseils d’entreprise (NCE), explique son président Hubert Fabre, nous avons des adhérents qui ont un service complet en droit des affaires ; pour les entreprises de nos territoires, nos atouts sont évidents sous l’angle du secrétariat juridique, de la conservation des documents, de l’immobilier d’entreprise ou de la gestion patrimoniale, mais également de la proximité, parce que faire appel à son notaire évite d’avoir à faire 50 ou 100 kilomètres en voiture pour aller dans la grande ville d’à côté lorsque l’on souhaite rédiger un bail commercial ou réaliser la cession de son entreprise ».
Pour parvenir à créer une nouvelle habitude chez une clientèle, il est par ailleurs indispensable de parvenir à un maillage géographique, car être accessible dans tous les territoires permet de profiter à plein de l’effet de réseau. « L’une de nos forces, c’est que les 200 études de NCE forment un bon maillage géographique ». Le maillage lui-même peut parfois déterminer le choix des membres du réseau : « Comme nous ne souhaitons pas que le réseau aille au-delà de 30 membres, souligne François Chalvignac, pour des raisons de bonne entente et d’activité du secteur, les dix derniers notaires que nous intégrerons doivent permettre de finaliser notre maillage du 
territoire ».

L’autre pôle de l’action des réseaux porte sur l’action interne. Un premier axe majeur consiste à développer les compétences et la spécialisation de leurs membres. « Dans notre domaine, souligne François Chalvignac, la réglementation a évolué sur les baux, les classements hôteliers ont changé, mais également un élément important sur lequel se former tient au fonds de commerce électronique, car désormais, avec un hôtel, on vend un site internet et les différents réseaux sociaux, et il faut s’assurer de qui possède ces comptes, mais également les inclure dans la valorisation du bien ». Certains réseaux offrent des formations en présentiel, comme l’atelier de formation organisé par NCF à Deauville, le séminaire de cohésion de NCI à La Baule, ou la formation trimestrielle de Notel, quand d’autres privilégient des formations en webinar. Ce dernier format permet, par exemple, au réseau NCE d’organiser entre 15 et 20 formations d’une heure environ par an. Une autre manière de transmettre consiste, comme le propose le MJN, à réaliser des guides de bonnes pratiques accessibles à tout le notariat. Les travaux en cours au sein du MJN portent notamment sur la médiation notariale, avec comme objectif, explique, Frédéric Gerbet, président du mouvement, « de répondre aux questionnements pratiques pour aider un notaire qui veut développer ce service de médiation : où aller s’inscrire ? vers qui se tourner ? où se former ? comment impliquer les collaborateurs ? combien cela va me coûter ? comment s’organiser ? ».
Un deuxième axe majeur porte sur la collaboration entre les membres du réseau. Cela prend la forme d’entraide pour développer son activité, « par la divulgation des biens que nous avons à la vente au sein du réseau Notel », ou par la transmission de modèles d’actes, le partage de bonnes pratiques, ou encore la possibilité de poser des questions aux autres membres. Tout cela est bien sûr facilité quand il existe « une plate-forme collaborative suffisamment utilisé, précise Hubert Fabre, où les membres du réseau peuvent trouver de la réactivité quand ils ont besoin d’aide ».

La force du réseau se manifeste aussi dans le domaine des logiciels professionnels : « Aujourd’hui, l’offre en matière de gestion de patrimoine ne nous satisfait pas, indique Vincent Chauveau, nous avons fait une réunion de cadrage et nous allons soumettre notre cahier des charges à des sociétés d’informatique qui ont besoin d’identifier nos besoins ». Le nombre fait également la force en matière de tarifs, puisqu’il « devient plus facile de négocier lorsqu’on est nombreux ».

Au-delà de la spécialité sectorielle, ces réseaux sont aussi des lieux de réflexion et d’échange pour faire évoluer les pratiques notariales au sens large. Un exemple de bonne pratique que les réseaux cherchent à promouvoir est le travail sur les fichiers clients : « Nous avons organisé des réunions et fait venir des experts pour insister sur l’importance de la matière dont on dispose, 60 000 fichiers informatiques par notaire, c’est énorme ; au lieu de se plaindre des nouvelles études, nous allons travailler les fichiers clients que nous avons achetés. Et de manière plus générale, les notaires doivent passer d’un modèle de l’acte à un modèle du service ».

Une autre thématique abordée est celle des méthodes de management interne. Le réseau NCE a ainsi proposé des formations en carte mentale, un outil de prise de décision, ainsi qu’en lean management, une méthode innovante de gestion des flux de production des actes, ou encore en communication sur les réseaux sociaux.

De son côté, le MJN, qui fait le choix de s’adresser à toutes les professions du notariat, a créé une commission de travail sur l’entretien annuel d’évaluation, abordé donc « sous tous les angles, côté employeur comme côté employé, pour montrer qu’il s’agit d’un outil de management indispensable, encore trop peu pratiqué dans le notariat et parfois mal utilisé. Le travail de la commission va consister à analyser les freins à son développement, et à réaliser un guide des bonnes pratiques ».

« Les réseaux sont indispensables pour survivre » - Vincent Chauveau, notaire à Nantes

« Avec 4 000 nouveaux notaires à venir, il va falloir faire grossir le gâteau. Si chacun des huit créateurs qui s’est installé autour de mon étude me prend trois dossiers par mois, je dépose le bilan. Mais, face à cela, les initiatives isolées ne marcheront pas, il faut du collectif. Les réseaux représentent une stratégie d’action qui va nous permettre de développer notre offre pour aller conquérir des parts de marché. Ils sont une stratégie de déploiement de la marque Notaires de France, et sont la seule possibilité pour qu’anciennes et nouvelles études puissent vivre correctement ».

Jordan Belgrave

Article initialement publié dans le Journal du Village des Notaires n°75

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