Pendant longtemps, les notaires arrivaient à l’étape de l’installation avec un dossier complètement structuré, notamment au niveau de l’implantation, car c’était un des éléments essentiels du dossier Chancellerie. Ce n’est plus le cas. Un projet dûment mené devrait toutefois inclure une étude du foncier disponible dès que le notaire se trouve en attente de publication au JO, si ce n’est avant. Parmi tous les tirés au sort, ceux qui s’en sortent le mieux sont d’ailleurs ceux qui ont pris en compte l’ensemble des éléments le plus tôt possible et ont une perspective la plus claire possible sur leur local d’activité. Quels doivent en être les différents éléments ?
Le premier critère est déterminé par le dossier de candidature puisque la commune où le notaire est tiré au sort est celle où il doit chercher à s’installer. Il y a des exceptions, dans la mesure où la commune en question peut ne pas offrir de locaux adaptés. Il est alors possible de se tourner vers des communes à proximité, tout en gardant en tête l’emplacement géographique initial de son projet, notamment en termes de durée de transport pour la clientèle.
Ensuite, le critère second est la visibilité. Pas de clientèle sans visibilité, et pas d’étude viable sans clientèle. Le fond de cour le plus confortable ne vaudra jamais une devanture dans une rue commerçante, surtout pour un notaire s’installant dans une ville où de nombreux confrères sont, et seront, présents – car il faut également prendre en compte le fait que la réforme Macron va beaucoup changer le paysage local du notariat. Il est également important de regarder l’environnement économique pour ne pas se retrouver avec plusieurs créateurs notaires dans la même rue. Cette primauté de la visibilité peut être minorée quand le notaire a une expertise – conseil aux entreprises, droit agricole,… – qui le distingue des autres notaires et lui permet de développer sa clientèle par le démarchage direct et le bouche-à-oreille.
Le choix du lieu de situation de l’office est également primordial car il va participer à la création de l’image que le notaire souhaite renvoyer et véhiculer : quartier plus ancien et immeuble plutôt traditionnel ? Ou quartier plus récent et immeuble contemporain ?
Toutefois, dans les métropoles, rien ne garantit de trouver un local en rez-de-chaussée avec une façade rue et qui soit abordable en termes de tarif. Il est donc fréquent que les nouvelles études s’installent dans les étages, avec une belle plaque en bas d’immeuble et un travail sur la communication de l’étude. Il faut néanmoins veiller à une accessibilité optimale (cf. infra).
Concernant la taille, c’est un vrai choix qui n’a de réponse qu’en fonction de l’énergie du notaire et de ses projections. Soit la priorité est donnée à l’emplacement, quitte à avoir une petite surface, ce qui pourra amener le notaire à déménager rapidement, soit la priorité est donnée à la surface qui ouvre la possibilité d’embaucher rapidement et plus facilement, quitte peut-être à prendre trop grand au tout début. Chaque choix a donc ses défauts, puisque le premier place l’étude dans une situation temporaire, et peut induire quelques mois difficiles si le personnel de l’étude grandit sans que les locaux n’y soient adaptés ; quant à l’autre choix, il implique évidemment un effort supplémentaire en matière de communication pour suppléer un emplacement moins optimal.
Accessibilité et évacuation
Non seulement le règlement national demande aux notaires de disposer d’un « local décent susceptible de recevoir la clientèle dans les meilleurs conditions possibles », mais il va de soi que l’accessibilité est un critère majeur, pour les personnes à mobilité réduite, mais aussi toutes les personnes vieillissantes qui vont constituer un pourcentage de plus en plus important de nos populations. Dans le même esprit, les conditions d’évacuation du local choisi doivent être parfaitement conformes aux réglementations.
Faut-il acheter ou louer ?
Acheter est un acte fort, qui permet de se projeter dans un lieu et de l’aménager en sachant qu’on y restera longtemps. Cela représente un investissement de long terme qui peut même s’avérer très profitable dans les communes où l’immobilier augmentera ces prochaines années. Néanmoins, la location a cet avantage de réduire les coûts à court et moyen terme, et d’envisager plus sereinement la possibilité d’un changement de local. À cet égard, il est même possible d’envisager un bail dérogatoire, idéal pour se tester sur l’activité et sur l’emplacement, le lieu pouvant être quitté sans formalité ni préavis.
La qualité du réseau
Désormais incontournable pour toutes les activités, internet est particulièrement important au quotidien pour les notaires, à telle enseigne qu’il faut absolument contacter REAL pour s’assurer que le local que vous choisissez est éligible au dispositif. En outre, de plus en plus de logiciels et de stockage de données sont sur le cloud, et un accès optimal au réseau est indispensable. L’accès de tous les postes de travail concernés doit ensuite faire l’objet de travaux réalisés par des spécialistes.
Prévoir les travaux
Les travaux d’aménagement vont à la fois déterminer la qualité du travail pour soi et ses collaborateurs, mais aussi véhiculer l’image vers la clientèle, les confrères et les collectivités. Aujourd’hui, les notaires privilégient une image moderne, tournée vers l’accueil, et marquée notamment par la clarté des locaux. La budgétisation de ces travaux doit intégrer l’ensemble des tâches à accomplir pour pouvoir commencer à travailler aussi vite que possible :
mobilier, informatique, bureautique, téléphonie, archivage, négociation des contrats.
S’installer seul ou à plusieurs ?
S’installer à plusieurs peut être une réponse à plusieurs enjeux pour un nouveau notaire : partage des tâches en cas de surcharge temporaire, possibilité de se déplacer tout en assurant l’accueil à l’office sans avoir besoin d’embaucher, mutualisation des embauches. Néanmoins, il existe d’abord une impossibilité légale, car les notaires doivent obligatoirement créer l’étude de la même manière qu’ils ont horodaté. Ils ne peuvent donc s’installer à plusieurs à moins de l’avoir proposé dans le dossier. Mais, une fois signé ses premiers actes, un notaire peut envisager un rapprochement avec une étude déjà en place pour un fonctionnement multi-offices. Il est cependant important de se poser la question des points de convergence entre les différents notaires qui décident de travailler ensemble – quelle stratégie ? quelle perspective de développement – mais aussi les complémentarités qui peuvent exister, et qui vont produire de très bonnes synergies, telles que des spécialisations différentes – droit de la famille, négociation immobilière, droit agricole…
Jordan Belgrave
Article initialement publié dans le Journal du Village des Notaires n°76