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Immobilier : un marché résilient et en pleine(s) mutation(s)

Immobilier : un marché résilient et en pleine(s) mutation(s)

La crise du coronavirus, protéiforme, a chamboulé le monde et son économie en leur imposant tout un ensemble de mesures de distanciation sociale. Sur le terrain de l’immobilier, l’ensemble des acteurs du marché a dû adapter leurs process, et plus largement leurs comportements. Conséquences, de nouvelles tendances se forment. La Rédaction du Village des notaires vous propose de revenir sur toute la période depuis le début de la crise et les enjeux liés.

Ce n’est pas un euphémisme que de dire que l’irruption de la Covid-19 dans nos vies les a considérablement transformées. De même, elle a atteint les secteurs de notre économie comme rarement auparavant, la plupart des observateurs étant obligé de revenir à 1929 pour établir une comparaison suffisamment proche.

2020 : année de la rupture.

Du côté du marché immobilier, les notaires, qui publient régulièrement des notes de conjoncture, avaient souligné jusque-là la « santé de fer » et le dynamisme incontesté de celui-ci avec des indicateurs très positifs. Or la rupture fut brutale sur ce dernier plan (des indicateurs) : le premier confinement avait en effet complètement stoppé la machine.

Les mesures de distanciation sociale et l’incertitude concernant l’évolution épidémique n’offraient alors aucune perspective solide pour les notaires sur le temps long. Une chose se faisait petit à petit évidente néanmoins : le virus était maître du temps. C’est sur cette évidence que l’ensemble des autres paramètres allaient devoir se positionner, que ce soit les comportements des ménages ou plus largement la politique de taux d’intérêts (qui participe de la définition de l’accès des ménages au crédit immobilier, entre autres).

A l’occasion de leur première note de conjoncture après le début de la crise (datée d’avril 2020), les notaires se risquaient tout de même à deux propositions pour la suite :
-  Celle tout d’abord d’un épisode « relativement contenu dans le temps et dans son ampleur  » où l’immobilier pourrait « assez vite reprendre un rythme de croisière, certes affaibli mais en restant relativement dynamique. »
-  L’autre option concerne cette fois un scénario du pire où « le confinement se prolonge ou se réitère et aucune réponse médicale n’est de nature à garantir l’absence d’un retour de la pandémie ». S’ensuivrait alors un chômage de masse, une baisse des revenus des ménages et une croissance en berne.

Toujours est-il que, à l’époque les notaires mettaient en garde : si reprise il y a, elle sera limitée du fait des spécificités du marché.

Une mobilité à plusieurs visages.

De fait, les notaires, au gré des notes de conjoncture, ont fait état d’une reprise de l’activité immobilière (une véritable résilience de sa part) : « À fin août 2021, le volume de transactions de logements anciens en cumul sur les douze derniers mois dépasse, une fois encore, le volume record du mois précédent, avec 1 208 000 transactions, en hausse de 23 % sur un an. [1] »

La tendance marquante depuis des mois est celle d’une plus grande mobilité des Français, avec des écarts sociologiques selon les populations. « La tendance constatée ne concerne qu’une partie de la population en capacité de s’organiser, tant personnellement que professionnellement. » rappellent les notaires. Néanmoins, les confinements dans les grandes villes ont fait prendre conscience à toute une partie des citadins de la grande vulnérabilité de la vie dans ces environnements. Par ailleurs, la pierre garde son pouvoir d’attraction grâce à la sécurité qu’elle apporte, et au complément de revenus qu’elle pourrait un jour représenter. Dans ce contexte, c’est l’indice de la confiance des ménages qui remonte, auparavant victime d’une « baisse historique » durant le confinement.

Ces déplacements de population des grandes villes vers des communes plus petites où la pression foncière est moins forte a un fort impact, par le jeu de l’offre et de la demande, sur les prix des biens immobiliers dans ces zones. Ainsi, selon plusieurs agences immobilières, le marché se porte très bien mais les prix sont beaucoup trop hauts [2]

Pour prévoir les évolutions des volumes de ventes et donc des prix, l’étude du volume des avants-contrats a constitué un indicateur efficace pour les notaires. En tant qu’accord préliminaire fixant par écrit les conditions futures de la vente et avec ses données fiables et contractuelles. Ainsi, selon les notaires « il s’écoule en moyenne un peu moins de 3 mois entre l’avant‐contrat et la signature de l’acte authentique », ce qui leur fait dire que « l’indicateur sur les avant‐contrats préfigure avec environ 3 mois d’avance les indices Notaires‐INSEE. » [Source : Indices Notaires-INSEE]

Malgré le premier confinement, « les avant-contrats enregistrés pendant cette période, et immédiatement après celle-ci, reflètent encore l’attitude de candidats à l’acquisition, disposant de références et engagés dans une décision d’achat d’avant-confinement. » La tendance s’est poursuivie jusqu’ici, et dans leur dernière note de conjoncture, les rédacteurs du CSN indiquaient qu’« au plan national, les projections des avant-contrats prévoient, jusqu’en novembre 2021, une poursuite de la hausse des prix », celle-ci concernant à la fois les appartements et les maisons.

L’Ile-de-France, elle, connaît un basculement du rapport de force entre ses communes. L’écart se creuse entre Paris et les autres départements au bénéfice des seconds : « Entre les appartements et les maisons, selon que l’on se trouve en Petite ou Grande Couronne, les évolutions de prix se différencient : + 2,7% en Petite Couronne en novembre 2021 pour les appartements, mais + 5% en Grande Couronne. Ce sont les maisons qui connaîtraient la plus forte hausse, avec la pression de la demande : les 8 % de hausse pourraient être dépassés en Grande Couronne ; + 6 % en Petite Couronne. […] De son côté, Paris connaît une légère érosion sur un an (- 0,7 %).  »

Ces hausses de prix posent néanmoins question sur le terrain de l’accès au logement et, corrélativement de l’accès au crédit. De son côté, le Haut Conseil de Stabilité Financière a annoncé par voie de presse que les règles édictées en janvier 2021 allaient devenir contraignantes à partir du 1er janvier 2022. [3] « Ces règles consistent en un taux d’effort, c’est-à-dire le montant total des dépenses liées à l’habitation rapporté aux revenus, de 35% maximum, une durée d’endettement de 27 ans au plus dans certains cas et la possibilité de déroger à ces critères pour 20% des crédits. » L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), gendarme du secteur financier, sera chargée de veiller au respect de ces conditions qui doivent ainsi sécuriser l’accès des ménages au crédit.

Les enjeux des territoires face à cette mobilité.

Comme l’observent les notaires dans leur dernière note de conjoncture, « cette redistribution est un enjeu de taille au regard de l’aménagement et du développement du territoire. » Les chiffres sont éloquents : un tiers des acheteurs recherchent un bien dans une ville de moins de 20 000 habitants. C’est trois fois plus qu’il y a un an, selon les données de SeLoger et près d’un acquéreur sur cinq recherche en zone rurale, soit quatre fois plus qu’il y a un an. [4]

Suffisant pour parler d’exode urbain ? Élus comme notaires n’observent pas cela : « il n’y a pas d’« exode » urbain à ce jour. La tendance constatée ne concerne qu’une partie de la population en capacité de s’organiser, tant personnellement que professionnellement. Elle n’intéresse pas la majorité de la population française et, corrélativement, pas non plus celle des accédants à la propriété. Cette tendance, liée aux confinements, pourrait en fait n’impliquer qu’une population précise et limitée, sociologiquement définie (âge, profession...). » Un énième clivage dans la société ?

Dans le cadre de son plan de relance visant les villes moyennes, l’exécutif avait annoncé le 8 septembre 2020 les résultats de la première édition de son programme « Action Cœur de Ville » qui « vise à faciliter et à soutenir le travail des collectivités locales, à inciter les acteurs du logement, du commerce et de l’urbanisme à réinvestir les centres-villes, à favoriser le maintien ou l’implantation d’activités en cœur de ville, afin d’améliorer les conditions de vie dans les villes moyennes. »

En complément, l’Agence Nationale pour la Cohésion des Territoires a lancé l’Observatoire des mobilités dans les centres villes lequel doit « analyser l’évolution de l’attractivité des 222 cœurs de ville participant à « Action Cœur de Ville » d’août 2020 à août 2021 grâce à trois indicateurs : la fréquentation piétonne, le niveau d’attractivité de ces villes-centres au sein de leurs agglomérations et la provenance des visiteurs extérieurs.  [5] » Les villes participantes pourront ainsi comprendre et suivre les dynamiques de fréquentation dans leurs centres-villes et prendre des mesures en conséquence.

Cette envie de verdure, traduction d’une volonté de « déconnexion connectée » [6], ne peut bénéficier aux petites villes et villes moyennes que si elles ont la capacité de proposer toutes les infrastructures et notamment des moyens de communication très performants, au risque de laisser subsister des zones blanches (zones non ou mal couvertes) (Voir notre article sur Zones blanches et accessibilité du service public). Les villes sont aussi confrontées à une problématique d’offre de logements, aggravée par la crise du coronavirus.

Selon les données du ministère de la Transition écologique, « sur un an, d’octobre 2019 à septembre 2020, 393 300 logements ont été autorisés à la construction, soit 43 900 de moins qu’au cours des douze mois précédents (- 10,0 %). Dans le même temps, 386 500 logements auraient été mis en chantier, soit 22 900 de moins (- 5,6 %) que dans les douze mois précédents.  [7] » Dans le même temps, les chantiers en cours ont été considérablement ralentis par la crise et les mesures sanitaires mises en place.

Simon Brenot
Rédaction du Village des notaires


Notes :

  • Immobilier : un marché résilient et en pleine(s) mutation(s)

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