Pour ouvrir l’événement annuel du notariat après une première journée dédiée à la formation, Thierry Delesalle, Président du 118e Congrès des Notaires, a d’abord souligné l’attraction de ce rendez-vous à l’international, puisque suivi par les représentants de 31 notariats étrangers. Environ 10 000 personnes en tout ont répondu présentes pour assister à cette « communion annuelle » entre la profession et les politiques, et pour laquelle l’équipe du Congrès a travaillé « avec acharnement » pendant 2 ans. Ingénieur juridique, créateur de droit, Family officer, auditeur, médiateur, la profession évolue et c’est tant mieux [1] !
Les notaires sont des créateurs de droit
Introduisant le notariat comme il introduirait un conte, le Président du Congrès a invité la profession à « amorcer un virage » vers une véritable ingénierie, que les notaires mettent déjà en oeuvre au travers du conseil qu’ils apportent à leurs clients. À ce titre, les notaires sont des créateurs de droit qui inventent de nouveaux contrats, clauses, outils, réflexes, concepts, etc. Or changer une virgule dans un article de loi peut parfois changer le monde, dixit Thierry Delesalle... Et aucun membre de la grande famille des juristes ne dira le contraire !! Nous en parlions également ici.
De la même manière, il a pu souligner que, en pratique, le family office n’est pas un concept si récent puisqu’il est pratiqué par les notaires depuis le Moyen-Âge lorsque ce qu’on appelait les chefs de famille roturiers, chez qui le droit d’aînesse n’existait pas, leur demandaient d’élaborer des stratégies de transmission successorale. L’importance du conseil délivré par le notaire rejoint d’ailleurs la raison d’être du notariat, qui est entre autres de « conseiller avec rigueur et impartialité ».
Ont aussi été identifiés 3 dangers pour le notariat à l’heure actuelle :
- la diminution du nombre d’actes de vente immobilière du fait de la baisse drastique de la construction, qui s’oppose à une demande toujours croissante ;
- la fragilisation de l’acte authentique, dont les qualités substantielles sont méconnues des responsables politiques ;
- et la baisse du tarif des notaires.
Passer d’une culture de l’acte et du dossier à une culture du conseil et du client
Pour pallier ces risques, le notariat doit nécessairement poursuivre son développement et, notamment, passer d’une culture de l’acte et du dossier à une culture du conseil et du client. Pour cela, l’aide apportée au notaire par l’intelligence artificielle et l’innovation en général est précieuse et vient augmenter les 4 atouts de ce professionnel que sont :
- sa formation ;
- sa pédagogie ;
- son conseil désintéressé et impartial ;
- et la solidarité du notariat, son unité.
En tant qu’artisan de la paix sociale, que professionnel de la confiance, qu’interlocuteur de proximité, le notaire est à même de « percevoir les évolutions sociales bien avant la jurisprudence ou le législateur ».
Gilles Finchelstein, Directeur général de la Fondation Jean Jaurès, est aussi intervenu pour rappeler que, dans une société de défiance généralisée, une large majorité des Français fait confiance aux notaires, plus qu’à n’importe quelle autre professionnel ou institution.
Plus gérer des dossiers, accompagner les citoyens dans l’accomplissement de leurs projets
Alexandre Thurel, Rapporteur général, a quant à lui insisté sur les points communs entre la mission de l’ingénieur et celle du notaire et sur la capacité d’écoute de leurs clients par les notaires, qui sont encore trop connus pour leur seule fonction de rédaction d’actes authentiques. À ce titre, il s’agit pour le Rapporteur général d’une véritable révolution culturelle. Plus que gérer des dossiers, la mission du notaire consiste à accompagner les citoyens dans l’accomplissement de leurs projets.
Outre la définition de l’ingénierie notariale, il s’agissait aussi de clarifier sa destination en rappelant qu’elle ne s’adresse pas qu’aux personnes ayant un patrimoine important et le niveau de patrimoine ne doit pas conditionner l’accès au conseil délivré par le notaire.
Une « profession stratégique pour la Nation »
Enfin, l’allocution de David Ambrosiano, Président du CSN, a salué la richesse des débats intellectuels suscités par le Congrès et exprimé son optimisme malgré le contexte dominé par les incertitudes et les conflits sur le plan international, en réitérant son soutien au notariat ukrainien.
Parmi les projets stratégiques du notariat français, il a pu insister sur les démarches entreprises pour assurer la souveraineté et la sécurité de ce notariat, en revenant notamment sur :
- l’aboutissement technique du projet d’autorité souveraine d’enregistrement lancé l’an passé ;
- le lancement récent du nouveau projet de répertoire électronique RE’EL ;
- la conception d’un outil d’intelligence artificielle de détection de certaines anomalies dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT).
L’installation des notaires a aussi été abordée et un message a été adressé au garde des Sceaux pour que la périodicité de la révision de la carte des créations d’offices soit revue au lieu d’être bouleversée tous les 2 ans. Éric Dupond-Moretti a pu, dans un discours retransmis, assurer à son tour, sa confiance dans le notariat et faire le bilan d’une collaboration réussie et à poursuivre entre la profession et le Ministère.
Retrouvez ici (lien CSN) l’intégralité des discours d’ouverture.
Notes :