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[Entretien] Les cinq ans de Notaires au féminin.com. Bilan et perspectives par Barbara Thomas-David

[Entretien] Les cinq ans de Notaires au féminin.com. Bilan et perspectives par Barbara Thomas-David

Barbara Thomas-David, notaire à Paris a créé en 2020 l’association Notaires au féminin.com. qui fêtera ses cinq ans d’existence en 2025. À cette occasion, la Rédaction a souhaité faire un point avec sa présidente sur l’activité et l’actualité de son association.

Pouvez-vous nous faire une rétrospective de Notaires au feminin.com ?

Barbara Thomas-David : Effectivement, nous fêterons le cinquième anniversaire de notre association à l’occasion de la journée des droits des femmes le 9 mars prochain. « Notaires au féminin. Com » organisera lors de cette journée un grand évènement, dont je ne vais pas encore pouvoir vous dévoiler le thème. Pour nos cinq ans, nous avons toutefois choisi un sujet iconique tournant autour des valeurs de notre association pour fêter cet anniversaire symbolique.

La profession s’est extrêmement féminisée ces dernières années. J’ai prêté serment en l’an 2000 et à l’époque, il y avait seulement 14 % de femmes notaires, nous sommes désormais à 57 %. Cette évolution s’est faite tout naturellement sans la mise en place de quotas particuliers.

La réflexion que je m’étais faite est qu’il n’était quand même pas normal que cette profession, qui a eu cette ascension fulgurante en termes de féminisation, n’avait pas finalement d’association représentative. Nous ne voulions cependant pas créer une association féministe, parce que la profession a justement réussi cet exploit de se féminiser naturellement en une génération.

Notre objectif était plutôt de concrétiser nos actions non pas dans un cadre de revendications féministes, mais plutôt dans un cadre de cohésion et de globalisation professionnelles.

Parallèlement, il y avait un autre sujet qui était vraiment au cœur de nos préoccupations et qui reste toujours d’actualité, c’est l’indépendance économique et financière des femmes. Malgré les lois Copé-Zimmermann en 2011 et la loi Rixain en 2021, on se rend compte que même aujourd’hui, il y a encore beaucoup trop de violences économiques dont sont victimes les femmes. Les femmes et les hommes ne sont pas équitables dans la gestion et le règlement de leur patrimoine, soit parce qu’elles ne sont pas informées, soit parce qu’elles n’ont pas l’accès au droit. Quand elles ont finalement accès au droit, il est souvent trop tard. Nous, les notaires, nous sommes des juristes de proximité, puisque nous concourrons à l’accès au droit au quotidien. Nous disposons de plus d’un maillage territorial assez exceptionnel.

Trop souvent, les femmes n’osent pas encore ouvrir la porte des études notariales. Les notaires de France ont clairement un rôle de communication en disant « poussez la porte d’une étude de notaires ». De plus, il y a des femmes qui craignent d’aller chez le notaire parce qu’elles ont peur, justement, d’avoir accès au « notaire-type » présent dans l’inconscient collectif, c’est-à-dire un homme assez âgé, qui n’est pas accessible, qui est dans son bureau et qui ne va pas les écouter.

Donc, le but de l’association c’est de dire, « Mesdames, poussez la porte de nos études ». Vous serez reçues par une femme ou bien un homme, mais vous serez avant tout reçues par des gens bienveillants qui vont vous écouter et qui vont essayer de trouver une solution à vos problématiques.

À vous entendre, il y aurait presque un phénomène d’autocensure des femmes à se rendre chez un notaire ?

B. T-D. : Exactement. Dans l’inconscient de nombreuses femmes, un notaire ne pourra pas répondre à leur problématique. La vision classique du notaire, c’est la gestion d’une vente immobilière ou d’une succession, mais ce n’est pas un conseiller à toutes les étapes clés de la vie.

Déjà, il y a une problématique de connaissance du métier, de savoir ce que le notaire fait. Et puis, il y a cette peur d’avoir accès à quelqu’un qui ne va pas nous entendre. Je vais vous donner un exemple concret. On a fait avec des commissaires-priseurs un coaching sur l’évaluation de la valeur des bijoux dans les successions. On nous a expliqué l’ensemble des réflexes à avoir pour avoir une première idée de leur valeur. Le constat qui nous a également été fait est que les femmes n’osent pas demander l’évaluation des bijoux parce qu’elles craignent de se faire juger par un homme notaire.

C’est quand même incroyable cette histoire ! Les femmes n’osent pas demander parce qu’elles ont honte… Si les femmes savaient qu’elles avaient quelqu’un de bienveillant à leur écoute, peut-être qu’elles oseraient clairement dire à leur notaire qu’elles souhaitent vendre leurs bijoux en intégrant leur valeur dans la succession.

Cette attitude des femmes est-elle une caractéristique transgénérationnelle ou va-t-on la retrouver plutôt dans des générations plus âgées, qui auraient une vision plus traditionnelle de la relation hommes/femmes ?

B. T-D. : Ce qui est assez étonnant, c’est qu’on retrouve cette attitude dans tout type de générations et dans tous types de catégories socioprofessionnelles. J’ai eu la chance de faire des webinaires pour de grandes écoles de commerce françaises. J’ai entendu des femmes me dire : « j’ai bien réussi ma carrière professionnelle, mais en ce qui concerne mon patrimoine privé, je ne me suis occupée de rien. C’est mon mari qui s’est occupé de tout. Nous sommes en train de divorcer, c’est catastrophique ». Ces femmes n’osent pas aller voir le notaire de leur mari…

Dans ce contexte, et c’est une bonne nouvelle, l’association a gagné une visibilité assez exceptionnelle. Nous avons eu un point de bascule l’année dernière.

On commence à voir notre pari gagné : celui de penser à faire intervenir les notaires lorsque l’on parle de l’indépendance économique des femmes. Là, j’ai la chance d’être invitée à l’Assemblée nationale sur le thème « Rompre le cycle des violences économiques » par la députée Marie-Pierre Rixain.

Quelle est la géographie des membres de l’association aujourd’hui ?

B. T-D. : Dès le début, nous avons voulu créer une association France entière. C’est vrai que lorsque nous organisons des évènements, cela se passe souvent dans la capitale. Mais nous déplaçons aussi en province nos événements, notamment à l’occasion des congrès. Nous étions présentes au Congrès des Notaires de Bordeaux. Nous essayons de faire le maximum d’évènements possibles en région, tout en tenant compte de nos contraintes d’agenda. Nous sommes une association nationale et nous avons même des consœurs résidant dans les DOM-TOM.

Nous sommes ravies de cette évolution. Au congrès, il y avait des délégations de femmes notaires d’autres pays. Il y en a quelques-unes qui très gentiment ont rempli leur bulletin d’adhésion. On a par exemple une consœur de Dakar qui a adhéré.

Après ces presque cinq années d’existence, quels sont, selon vous, les axes de travail à envisager ?

B. T-D. : Nous définissons chaque année nos axes de travail.

Pour nos consœurs, nous accordons une grande importance au retour d’expérience donné par nos adhérentes sur les sujets qu’elles traitent au quotidien et leurs attentes. Nous voulons faciliter la carrière des femmes notaires et lutter contre le sentiment d’isolement.

Nous souhaitons aussi nous focaliser sur les problématiques sociétales de notre époque. Il y a actuellement deux sujets qui nous apparaissent très importants.

Il y a d’abord la santé et l’augmentation continue de l’espérance de vie de nos concitoyens. Le notaire est naturellement acteur de tous ces sujets autour de la dépendance, de la perte d’autonomie, de la fin de vie, de l’accompagnement des enfants dans tout ce qui entoure le handicap. Ces problématiques sont fondamentales parce que le notaire est là dans les moments heureux, mais aussi dans les moments moins heureux.

Ensuite, nous nous intéressons beaucoup à l’intelligence artificielle, parce que la société change énormément.

J’ai une cliente chirurgienne qui est récemment allée aux États-Unis pour acheter de nouveaux robots qui vont l’aider dans son travail. Ces robots fonctionnent avec de l’intelligence artificielle.
Vous voyez, ce sont des sujets qui sont connexes, mais nous voulons vraiment être au cœur des problématiques sociétales du moment, mais aussi nous projeter dans l’avenir.

Vous vous inscrivez donc dans le sillon tracé par le nouveau Président du CSN Maître Savouré…

B. T-D. : C’est indispensable. Nous avons créé un webinaire métier qui s’appelle « Intelligence artificielle, opportunités et risques », que nous avons spécialement créé pour nos adhérentes. En termes d’événements internes, nous essayons de faire des événements propres au métier. Et puis, nous proposons des webinaires sur des sujets de management et de leadership féminin.

Je précise aussi que je considère que la cause des femmes ne peut avancer qu’avec les hommes. Pour moi, la féminisation d’une profession est un vrai atout compétitif, nous en sortirons tous gagnants.

En interne à la profession, cette féminisation, comment elle a été perçue ? Les pratiques professionnelles ont-elles évolué ?

B. T-D. : Au niveau de la profession, comme je vous l’ai dit, l’évolution s’est faite progressivement et naturellement. Nous avons mis du temps pour arriver à cette égalité dans les statistiques. De mon point de vue, cette égalité dans les chiffres n’est pas encore arrivée à maturité. Les femmes ont encore « le syndrome de l’imposteur ». Même si nous sommes égalitaires en nombre et que dans les instances nous avons désormais la parité, la féminisation reste encore très récente. Si vous observez les organes de gouvernance, jusqu’à récemment c’était encore très masculin.

Dans la pratique au quotidien de la gestion de la gouvernance, il faut le dire comme c’est, nous ne sommes pas encore arrivés à une vraie parité. Lorsqu’il y a de vraies décisions et de vrais enjeux, beaucoup de nos consœurs nous disent que ce sont les associés hommes qui ont le dernier mot. Donc, je dirais que cette égalité n’est pas encore complètement arrivée à maturité. On y arrive progressivement, mais je pense qu’il faudra encore bien cinq à dix ans pour qu’elle soit parfaite. C’est le principe normal d’une évolution, c’est-à-dire qu’il y a un « effet retard », autrement dit une dichotomie entre les chiffres et la réalité.

Pour plus d’informations, consultez le site de l’association : Notaires au féminin.com - Génération Femmes Notaires.
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