Un zonage ABC ajusté pour une meilleure adaptation aux réalités locales
Le zonage ABC est un dispositif qui classe les communes selon la tension de leur marché immobilier. Créé en 2003 et régulièrement mis à jour, ce zonage a pour but d’adapter les aides et les dispositifs publics aux spécificités locales, en tenant compte des déséquilibres entre l’offre et la demande de logements. La zone A bis, qui regroupe les marchés immobiliers les plus tendus comme Paris, contraste avec la zone C, qui concerne les secteurs où la pression immobilière est beaucoup moins forte. La réforme du 5 juillet 2024 [1], initiée par le Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, a redéfini ce zonage pour mieux refléter les évolutions rapides des prix dans certaines régions, en intégrant 688 nouvelles communes dans la catégorie des zones tendues. Cette reclassification est une réponse directe aux indicateurs de suivi des prix immobiliers, qui ont montré une hausse continue dans plusieurs zones du territoire.
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Le renforcement du logement locatif intermédiaire dans les nouvelles zones tendues
L’une des principales ambitions de ce nouveau zonage est de stimuler la construction de logements locatifs intermédiaires (LLI), des habitations destinées principalement aux classes moyennes avec des loyers inférieurs de 10 à 15 % par rapport au marché local. Ce type de logement est particulièrement pertinent dans les zones tendues, où la demande dépasse largement l’offre. Avec le reclassement en zone tendue de nombreuses communes, le gouvernement entend faciliter le développement de ces logements spécifiques, qui sont cruciaux pour répondre aux besoins des jeunes actifs, des fonctionnaires, et d’autres ménages aux revenus intermédiaires.
Par exemple, dans une commune nouvellement classée en zone B1, un logement locatif intermédiaire pourrait désormais être proposé à un loyer de 850 € par mois, contre 1 000 € pour un logement similaire sur le marché libre. Ce type d’ajustement peut avoir un impact significatif sur le pouvoir d’achat des ménages, en rendant l’accès au logement plus abordable dans des zones où la pression immobilière est particulièrement forte. En élargissant le champ d’action des opérateurs institutionnels spécialisés dans ce type de produit, cette réforme vise à augmenter l’offre de logements intermédiaires dans des secteurs où ils étaient jusqu’à présent peu présents.
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Facilitation de l’accession à la propriété grâce au prêt à taux zéro (PTZ)
L’autre pilier de cette réforme réside dans l’amélioration des conditions d’accès à la propriété. Le PTZ, dispositif phare d’aide à l’achat immobilier, voit son champ d’application étendu grâce au reclassement de nombreuses communes en zones tendues. Jusqu’à présent, ce prêt, qui permet aux ménages de financer une partie de l’achat d’un logement neuf sans payer d’intérêts, était réservé aux zones les plus tendues du marché immobilier.
Avec la nouvelle classification, des communes auparavant exclues du dispositif pourront désormais en bénéficier. Par exemple, un couple gagnant 40 000 € par an et souhaitant acquérir un appartement neuf à 200 000 € dans une commune reclassée en zone B1 pourra bénéficier d’un prêt à taux zéro de 40 000 €, alors qu’il n’aurait eu droit à aucun soutien financier avant la réforme. Cette extension du PTZ est une réponse directe à la difficulté croissante d’accéder à la propriété, particulièrement dans les zones où les prix immobiliers ont explosé ces dernières années.
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Soutien accru à la construction dans les zones déjà tendues
La réforme ne se limite pas à l’intégration de nouvelles communes dans le zonage ABC. Elle modifie également les conditions pour les 177 communes déjà classées en zones tendues, renforçant ainsi les incitations à la construction de nouveaux logements. Dans ces communes, la révision des plafonds de loyers pour des dispositifs tels que le Pinel permet d’améliorer l’équilibre économique des opérations pour les constructeurs. Par exemple, dans une commune passant de la zone B2 à B1, le plafond de loyer pour les investissements locatifs peut passer de 10,55 €/m² à 12,95 €/m², rendant les projets de construction plus attractifs pour les investisseurs.
De plus, l’accès au bail réel solidaire (BRS) est étendu dans ces zones, un dispositif qui permet à des ménages modestes d’accéder à la propriété à un coût maîtrisé. Le BRS dissocie la propriété du foncier de celle du bâti, réduisant ainsi le prix d’acquisition pour les acheteurs tout en garantissant un usage pérenne du logement pour les générations futures. Ce mécanisme est particulièrement utile dans les zones tendues, où la demande de logements à prix abordable est la plus forte. Les ajustements apportés par cette réforme visent donc à augmenter l’offre de logements dans ces secteurs tout en soutenant les acteurs du marché immobilier.
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Mise en œuvre immédiate et suivi de la réforme
Le gouvernement a opté pour une application immédiate de la réforme, soulignant l’urgence de la situation sur le marché immobilier français. Dès la publication de l’arrêté au Journal Officiel, les nouvelles classifications sont entrées en vigueur, permettant aux communes concernées de bénéficier immédiatement des nouvelles dispositions. Cette rapidité d’exécution témoigne de la volonté du gouvernement de répondre sans délai aux tensions du marché.
Par ailleurs, le dispositif reste flexible. Les préfets continueront à dialoguer avec les élus locaux pour ajuster les classifications en fonction des réalités du terrain. Des révisions périodiques seront également possibles, tous les trois ans, pour adapter le zonage aux évolutions du marché immobilier. Ce suivi repose sur des indicateurs de prix et de loyers, tels que ceux fournis par l’Observatoire des Loyers de l’Agglomération Parisienne (OLAP) et d’autres observatoires locaux.
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Notes :
Ferroudja Saidoun
Village des Notaires - Experts du Patrimoine