Bienvenue sur le site des Experts du patrimoine

Site de référence d’information juridique pour tout ce qui concerne les problématiques patrimoniales Notaires, professionnels de l’immobilier, de la gestion de patrimoine, de la banque, des finances et de l’assurance vous disent tout !

Nouveau !

Devenez auteur !

Retrouvez aussi l’actualité des legs et donations / rubrique associations

+ management des offices
[ENTRETIEN] : « Le conseil en gestion de patrimoine est le prolongement naturel de l'offre de services des notaires »

[ENTRETIEN] : « Le conseil en gestion de patrimoine est le prolongement naturel de l’offre de services des notaires »

Céline Chwartz, notaire à Toulouse, a fait partie de la première promotion du label « Notaires conseil en stratégie patrimoniale et familiale ». Diplômée en mars dernier, elle a accepté de répondre aux questions de la Rédaction pour partager son retour d’expérience. Sa conviction est que le conseil en gestion de patrimoine va offrir de nouvelles opportunités de développement aux offices. Enfin, elle a évoqué les problématiques actuelles rencontrées par les notaires dans leur pratique du droit de la Famille.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Céline Chwartz : Depuis 2009, j’exerce en tant que notaire à Toulouse dans une étude historique située en plein centre-ville. Mon parcours dans le notariat est atypique, car J’ai commencé ma formation par les sciences de gestion. Je suis en effet diplômée de l’École HEC Paris, programme grande école, après deux années de classe préparatoire. Après avoir obtenu mon diplôme d’HEC, j’ai poursuivi mes études avec un double parcours en droit, tout d’abord en droit des affaires et fiscalité, puis en droit notarial et en gestion de patrimoine.

Au sein de l’étude, je traite principalement des dossiers de droit patrimonial de la famille et l’ensemble des actes relatifs aux sociétés.

En parallèle, j’ai consacré du temps à diverses instances du notariat. J’ai été pendant plusieurs années membre de chambre, vice-présidente et responsable de la communication de la chambre interdépartementale des notaires de la Cour d’appel de Toulouse. Je suis membre des réseaux Notaires conseil d’entreprises (NCE) dont je suis délégué régional Occitanie, Nôtel et Pharmétudes. Je suis membre de l’Institut d’études juridiques (IEJ) du Conseil supérieur du notariat (CSN) dans la section droit de la famille. Je représente aussi le CSN au Conseil des notariats de l’Union Européenne (CNUE), dans la section droit des sociétés.

Enfin, je suis chargée d’enseignements à l’Université de Toulouse, à l’INFN et je coordonne depuis l’an dernier les Journées Notariales du Patrimoine avec l’Université Paris Dauphine pour le compte du CSN.

Expliquez-nous ce qui a conduit votre étude à être labellisée « Notaire Conseil en Stratégie Patrimoniale et Familiale » (NCSPF) ?

C. C. : La démarche de labellisation ne m’est pas inconnue. En effet, j’ai obtenu en 2016 le label NJE, Notaire juriste d’entreprise, le label Conseil aux familles en 2021 et Notaire conseil à l’international en 2023.

Quand le CSN a créé le label NCSPF, il m’a semblé pertinent de procéder à une synthèse de mes compétences acquises à la fois en droit des affaires et en droit de la famille et en droit fiscal. De fait, ce sont toutes ces compétences que nous retrouvons en gestion de patrimoine.

J’ai aussi été motivée pour mettre à jour mes connaissances acquises depuis l’obtention de mon diplôme en gestion de patrimoine à l’Université de Clermont-Ferrand il y a maintenant presque vingt ans.

Comment s’est déroulée la formation ? Quels ont été pour vous les thèmes les plus marquants ou formateurs ?

C. C. : Pour comprendre le contexte, la création de ce label découle des travaux du 118e Congrès qui a eu lieu en septembre 2022 à Marseille, portant sur l’ingénierie notariale.

Voilà pourquoi, dans la structure du programme de formation, les modules ont été organisés en fonction des trois commissions du Congrès : entreprise, famille, immobilier. Outre les formations scientifiques, des journées étaient spécifiquement consacrées à la mise en place d’un service de gestion de patrimoine au sein des études et à la gestion du projet d’entreprise lié à cette mise en œuvre.

Je suis personnellement ravie du succès obtenu par cette première session du label NCSPF. Effectivement, les inscriptions avaient été ouvertes en octobre 2023 pour un programme de formation qui s’est tenu de janvier à novembre 2024. La capacité maximale de 96 participants a été atteinte en l’espace de quelques jours. Une liste d’attente a même été constituée. Il me semble que les inscriptions pour la deuxième session ont connu le même succès.

Les profils des confrères ayant suivi la formation étaient divers, allant du notaire généraliste cherchant à étendre ses aptitudes à ceux, qui comme moi qui détenaient déjà des compétences en gestion de patrimoine. Je crois également que compte tenu de la situation actuelle, nos pairs explorent aussi de nouvelles voies de relais de croissance pour leurs offices.

Tout comme pour les autres labels attribués par le CSN, l’obtention du label NCSPF est soumise au respect de trois conditions spécifiques.

Il est évidemment nécessaire de réussir un examen de connaissances.

Il est également demandé d’élaborer un projet d’entreprise dédié. Nous endossons ici le rôle de chef d’entreprise et nous devons dans ce plan présenter des objectifs précis, qu’il s’agisse d’augmentation prévisionnelle du chiffre d’affaires ou d’acquisition de nouveaux dossiers. Puis, quelles mesures nous déclinerons en propositions de services, en stratégie de communication, voire en embauches et en acquisition de logiciels. Le projet d’entreprise doit être approuvé par le CSN et par la commission de labellisation.

Pour conclure, la signature de la charte de conseil patrimonial est nécessaire afin d’obtenir l’autorisation d’utiliser le logo et de communiquer autour du label. Une fois que ces trois critères sont remplis, le label est attribué à l’étude notariale pour une période de trois ans.

Si le notaire qui a réussi l’examen quitte l’office, ce dernier peut conserver le label. Cependant, il est nécessaire qu’un autre notaire suive la formation rapidement. Le notaire ayant rejoint un nouvel office devra soumettre un nouveau projet d’entreprise pour approbation.

Par la suite, tous les notaires sont soumis depuis 2012 à une obligation de formation continue de trente heures par an ou soixante heures sur deux ans. Quand nous obtenons un label, il est obligatoire d’effectuer au moins quatorze heures de formation par an, soit dans les matières liées au label, soit en gestion d’entreprise et relations clients. Après une période de trois ans, la commission chargée de l’attribution des labels exigera que nous actualisions notre projet d’entreprise initial et contrôlera les formations que nous avons suivies. Les vérifications étant faites, l’étude pourrait à nouveau se voir renouveler le label pour une durée de trois ans.

Le conseil en gestion de patrimoine est un secteur très concurrentiel. Selon vous, ce label est-il seulement une nouvelle offre de services en faveur de vos clients actuels ou bien ouvre-t-il la voie à un développement de la clientèle de votre office ?

C.C. : Rappelons qu’il existe tout un pan de la gestion de patrimoine dans laquelle le notaire n’intervient pas puisque la déontologie de la profession lui interdit de le faire. Il s’agit des opérations de maniement de fonds et de placement des capitaux.

De ce fait, sur cet aspect, aucune concurrence n’est envisageable. D’une manière générale, je remarque que nos clients manifestent un besoin réel de conseils et selon moi, le terme de conseil patrimonial englobe de nombreux aspects que les notaires gèrent déjà.

Par exemple, quand des clients nous sollicitent pour organiser une transmission, on constate souvent que leur régime matrimonial n’est pas toujours approprié, que ce soit en lien avec leur situation personnelle ou la transmission qu’ils prévoient. Nous sommes déjà dans une approche de gestion de patrimoine.

Avec l’augmentation générale de la durée de vie, nous voyons de plus en plus dans les offices lors du règlement des successions des héritiers qui doivent eux-mêmes envisager leur propre transmission de patrimoine.

Au-delà de la visibilité offerte par le label, il est nécessaire de questionner nos méthodes et notre offre de services. Évidemment, si nous ne faisons pas l’effort de promouvoir ou de faire reconnaître notre expertise, nous ne pourrons pas obtenir la rémunération correspondante.

C’est ce savoir-faire et la proposition de services correspondante qui vont permettre le « faire savoir » et donc déclencher les recommandations et faire fonctionner efficacement le « bouche à oreille », plus qu’une simple visibilité sur les réseaux sociaux. La méthode idéale est sans doute dans un premier temps de pouvoir mieux conseiller notre clientèle existante, ce qui va nécessairement amener à la signature de dossiers qui ne seraient pas forcément faits. Ensuite, notre clientèle sera notre meilleure ambassadrice.

Contrairement aux idées reçues, les niveaux de patrimoine à partir desquels un notaire peut offrir efficacement ses conseils ne sont pas nécessairement importants. Par conséquent, des individus ayant un enfant unique dont le patrimoine se situe entre 300 et 400 000 € peuvent déjà s’interroger et venir en discuter avec nous. Dans les grandes agglomérations, ces sommes représentent généralement la situation d’un couple possédant une maison en banlieue et détenant deux livrets A dans une institution bancaire.

Le paiement d’honoraires dédiés au conseil en gestion de patrimoine est-il difficile à faire admettre aux clients ?

C.C. : Quand j’ai commencé à travailler à Paris, je ne rédigeais pas d’actes, je ne faisais que des consultations patrimoniales donc nécessairement rémunérées en honoraires. Il est vrai qu’il s’agissait d’une pratique plutôt parisienne, que j’ai eu plus de mal à instaurer ici à Toulouse.

Vingt ans plus tard, nous avons toujours du mal à établir des factures pour nos clients en ce qui concerne les services de conseil patrimonial. Peut-être parce nous-mêmes ne sommes pas toujours à l’aise avec cette pratique.

Si nous pouvions réaliser chaque année une quinzaine à une vingtaine d’études patrimoniales rémunérées par honoraires, qu’il s’agisse d’études globales, d’études de transmission, des jeux de cantonnement dans le cadre d’une succession, ça serait déjà un bon début.

La difficulté avec le conseil en gestion de patrimoine, sauf si l’on investit réellement du temps dans ce domaine en réalisant par exemple une dizaine de pages d’analyse comportant diverses simulations financières, c’est que nous avons du mal à facturer de l’honoraire et en même temps de percevoir les émoluments liés aux actes de l’opération.

Peut-être que c’est moi qui ai tort, mais comme je perçois et envisage très rapidement la solution, j’ai tendance à la suggérer un peu trop rapidement au client. Dans tous les cas, l’apport pour l’étude doit s’apprécier globalement, y compris la rémunération au tarif des actes induits.

En septembre prochain, le congrès des notaires s’est fixé comme objectif d’ « accompagner les tribus d’aujourd’hui ». Quelles sont aujourd’hui les nouveaux défis auxquels font face les familles dans la gestion de leur patrimoine ?

C.C. : Je ne suis pas membre de l’équipe du Congrès de Montpellier, même si je connais bien certains d’entre eux qui sont avec moi dans la section famille de l’IEJ, notamment Virginie Darme Longuet, qui préside la première commission, et Stéphane David, qui est le rapporteur général du Congrès.

À ce stade, je n’ai pas de connaissances précises sur le détail des travaux des trois commissions.

Toutefois, au sein des offices, nous avons des questions beaucoup plus fréquentes qui concernent les familles recomposées. En outre, du fait de l’allongement de la durée de vie, la plupart des héritages se font au profit de personnes de plus de soixante ans, qui doivent eux-mêmes penser à leur propre transmission.

Nous voyons aussi apparaître de nouvelles questions autour des problématiques de filiation, notamment en lien avec les jurisprudences récentes sur le sujet. Je ne sais pas si ce sujet sera traité lors du Congrès, cependant, il s’agit d’un sujet d’importance croissante, lié par exemple à la reconnaissance en droit français, et donc pour les notaires, de la filiation des enfants issus de la gestation pour autrui (GPA), alors même que cette pratique reproductive est prohibée en France.

Nous avons également des questions tournant autour d’un potentiel aménagement de la liberté testamentaire. Par exemple, Il y a quelques années, un débat a eu lieu sur une éventuelle remise en cause de la réserve héréditaire. Il y a même eu un rapport qui est sorti sur le sujet avec la participation de professeurs de droit. On peut aujourd’hui par exemple se demander si l’assurance vie doit être incluse dans le patrimoine successoral et donc soumise aux règles de la dévolution et éventuellement de la réserve héréditaire ou pas.

Le programme du congrès comportera sûrement un certain nombre de sujets relatifs au droit de la famille dans sa dimension pure, c’est-à-dire hors du domaine patrimonial. Il est évident que ces sujets entraîneront inévitablement des conséquences sur la gestion de patrimoine.

Nous faisons du droit des personnes puisque les consentements d’adoption sont réalisés au sein de nos études. Nous en faisons aussi lorsque nous recevons les consentements à procréation médicalement assistée avec tiers donneur. Nous procédons enfin à la reconnaissance anticipée obligatoire avant la conception pour les couples de femmes.

Dans le domaine notarial, l’exercice du droit de la famille reste toutefois finalement très lié au droit patrimonial de la famille. C’est ce qui se passe par exemple, lorsque nous rédigeons les contrats de mariage ou lorsque les notaires assistent les clients dans la rédaction des conventions de Pacs, en les accompagnant dans le choix entre l’indivision et la séparation de biens. Mais aussi bien entendu dans le règlement patrimonial des séparations et des successions.

  • [ENTRETIEN] : « Le conseil en gestion de patrimoine est le prolongement naturel de l’offre de services des notaires »

Commenter cet article

Vous pouvez lancer ou suivre une discussion liée à cet article en cliquant et rédigeant votre commentaire. Votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé. Nous ne publions pas de commentaires diffamants, publicitaires ou agressant un autre intervenant.

A lire aussi dans la même rubrique :

[Congrès des Notaires 2018] Rencontre avec Odal

Si vous deviez définir Odal en 5 mots, auxquels pensez-vous ? Sécurité, rapidité, intuitu, digital et humain. Pouvez-vous nous présenter plus en détails les services proposé par Odal ? Odal est un service d’externalisation des formalités (...)

Lire la suite ...

[Congrès des Notaires 2018] Quai des Notaires : une solution par un notaire pour les notaires.

Quel a été l’élément déclencheur de votre réflexion à l’origine de la création de Quai des Notaires ? Il y a en fait eu des déclics multiples comme la constatation de la rupture de l’équilibre économique préexistant, accompagnée par les nouvelles (...)

Lire la suite ...

Interview d’Emmanuel Clerget, Président du 114ème Congrès des Notaires de France.

Demain le territoire, pourquoi ce thème ? Tout d’abord, je voulais un sujet, qui tout en embrassant une dimension juridique et technique, explore également un thème universel. Un sujet, aux frontières de l’économie, du politique et de la sociologie. (...)

Lire la suite ...

[En Direct du Congrès des Notaires 2018] Rencontre avec Terface

Comment présenter Terface en deux phrases ? Terface est spécialiste dans la présentation et l’assemblage des actes authentiques et copies exécutoires. Terface est aussi spécialiste dans la sécurité des données personnelles. Pouvez-nous nous en dire (...)

Lire la suite ...