Des propositions ambitieuses adaptées à l’urgence environnementale
Dans un contexte « où la crise écologique est de plus en plus pressante », le Congrès s’est fixé comme objectif ambitieux de « formuler des propositions innovantes pour encourager des projets respectueux de l’environnement ». Un beau programme de travail !
Lors de la conférence de presse, la Présidente, Marie-Hélène PERO AUGEREAU-HUE, le Rapporteur général Hervé de GAUDEMAR et les présidents des trois commissions ont présenté les points principaux des douze propositions qui seront débattues et soumises au vote des congressistes.
La Présidente a remercié en préambule l’ensemble des équipes pour leur travail, puisque le rapport fait cette année plus de 1000 pages. Les études vont bientôt recevoir leur exemplaire papier. Nouveauté cette année, il sera possible de naviguer dans le rapport et de poser des questions grâce à un module d’intelligence artificielle. Le maître mot cette année est d’offrir aux notaires de l’interactivité et une « totale liberté de navigation » dans le rapport.
Hervé de GAUDEMAR, Rapporteur général, a rappelé que le Congrès 2024 est le « 3ème congrès des notaires à traiter de la problématique environnementale après ceux de 1994 et 2008 ». Selon ses termes, ce congrès peut être défini comme « réaliste, engagé et pragmatique ».
Commission 1 : Anticiper les risques environnementaux
La première commission présidée par Eric MEILLER rappelle que les risques environnementaux ne peuvent désormais plus être ignorés, et qu’ils doivent être appréhendés dès la phase de conception des nouveaux projets. Pour ce faire, la première commission a présenté quatre propositions :
Proposition 1 : définir un véritable statut de l’arbre dans le Code civil avec la rédaction d’un article 515-15 qui pourrait définir l’arbre comme un organisme vivant dont la préservation est d’intérêt général. Cette inclusion dans le Code civil implique de fait la protection des arbres existants (même à ceux des deux mètres de limites de propriété) et ajuste les servitudes légales quant à la gêne potentielle des racines et de l’élagage créant un trouble anormal de voisinage.
Proposition 2 : face au risque avéré du recul du trait de côte français, la proposition vise à démontrer l’avantage du concept de « propriété temporaire ». Elle vise à offrir aux collectivités locales concernées par le recul du trait de côte de proposer aux propriétaires de conserver un « droit superficiaire » tant que la situation du terrain le permettra. Une meilleure information légale permettra aussi de mieux traiter les questions liées à l’éventuelle indemnisation des futurs immeubles concernés par le recul du trait de côte.
Proposition 3 : la commission propose de remettre au cœur de la gestion domaniale les « communs » avec l’exemple des forêts. Les forêts françaises sont caractérisées par un fort émiettement de la propriété que la législation actuelle réglemente assez inefficacement. Les communs apparaissent comme un mode de gestion collective plus efficace, notamment pour les parcelles de moins de 20 ha.
Proposition 4 : réformer l’état des risques et des pollutions, afin qu’il réponde mieux aux enjeux. Selon la commission, l’état des risques, remis avant toute mutation, doit être complété et réformé afin qu’il représente le plus fidèlement possible les risques auxquels sont soumis les immeubles concernés par la mutation.
2ème commission : Convaincre les acteurs
La deuxième commission présidée par Antoine URVOY s’est attachée, quant à elle, à proposer des pistes d’amélioration des relations particulièrement complexes entre parties prenantes des nouveaux projets d’urbanisme. Sur cette phase cruciale des projets, quatre propositions ont été formulées :
Proposition 5 : plaidoyer pour un régime du « proto-aménagement ». La commission rappelle l’importance prise par les établissements publics fonciers dans les opérations d’aménagement du territoire. Pour accompagner et sécuriser juridiquement les projets incluant une part importante de dépollution, désamiantage et démolition, le « proto-aménagement » peut être une solution intéressante à creuser à condition de l’intégrer au Code de l’urbanisme.
Proposition 6 : libéraliser les assiettes des autorisations d’urbanisme. La commission propose d’adjoindre au Code de l’urbanisme plusieurs articles qui permettraient d’offrir davantage de liberté dans la définition et la sortie de l’assiette.
Proposition 7 : développer la compensation environnementale des projets en redéfinissant son régime juridique. La commission propose de sécuriser la maîtrise du foncier nécessaire à la compensation environnementale, de créer un bail emphytéotique environnemental et enfin de fluidifier les mécanismes financiers de compensation environnementale.
Proposition 8 : simplifier et généraliser le déploiement du projet urbain partenarial (PUP) qui permet notamment de garantir le préfinancement des équipements publics associés aux nouveaux projets. La commission propose aussi qu’il soit un outil de financement de l’urbanisme de la transformation et qu’il soit étendu aux opérations de renaturation des sols.
3ème commission : réaliser des projets adaptés aux nouveaux modes de vie
Enfin, la troisième commission, présidée par Michèle RAUNET s’est attachée à détailler ses propositions permettant de répondre aux problématiques actuelles de réalisation des nouveaux projets.
Proposition 9 : donner de la souplesse au ZAN. Le Zéro Artificialisation Nette est la réforme majeure de l’urbanisme à l’horizon 2050. Dès le départ, le ZAN été critiqué par les acteurs locaux, car appliqué uniformément à l’ensemble du territoire et ne tenant pas assez compte des contextes locaux. La proposition vise à créer un système de réallocation des « droits à artificialiser », fonctionnant comme une bourse d’échanges au niveau de chaque région. Grâce à cette bourse, dont le fonctionnement doit nécessairement être encadrée juridiquement, les problématiques locales d’artificialisation pourront mieux être prises en compte.
Proposition 10 : favoriser la conversion des entrées de ville commerciales en quartier mixte et durable. Les entrées de villes, souvent monotones et perçues parfois comme des « verrues urbaines », offrent selon la commission une formidable opportunité pour créer des nouvelles zones mixtes d’habitat et de terrains à renaturer dans le contexte de mise en œuvre du ZAN. La commission recommande que les opérations de revitalisation du territoire (ORT) soient élargies aux entrées de ville. La commission préconise aussi d’aménager le régime des associations de foncier urbain (AFU) afin de faciliter les opérations de réaménagement foncier des entrées de ville.
Proposition 11 : passer d’un urbanisme de la construction à un urbanisme de la transformation. C’est bien une véritable révolution qui va bouleverser l’écosystème de la construction. Les opérations de transformation du bâti existant devront ainsi être privilégiées. La généralisation des permis de démolir permettra de limiter au maximum les opérations de démolition, parfois jusqu’à en interdire la possibilité pour des motifs environnementaux.
Proposition 12 : mettre l’environnement au cœur des projets immobiliers et d’aménagement pour sécuriser ceux qui les portent. La commission préconise la prise en compte systématique de l’environnement dès la phase de conception du projet afin de sécuriser au maximum l’exécution des autorisations d’urbanisme.
Retrouvez l’intégralité des propositions formulées par le 120e Congrès des Notaires de France
A la date de publication de l’article, le rapport du Congrès n’est pas encore accessible en ligne. Cependant, voici le lien pour le télécharger.
Comme chaque année, l’équipe du Village des Notaires sera présente au Congrès des Notaires. Vous pourrez nous rencontrer et échanger avec nous sur le stand K09. Au plaisir de vous y retrouver !
Axel Masson
Rédaction des Experts du Patrimoine (Village des Notaires)